L'affaire des otages occidentaux au Mali

Publié le par Frédéric Couteau - RFI

Le Mali a finalement libéré les quatre islamistes emprisonnés depuis près d’un an : deux Mauritaniens, un Algérien et un Burkinabé. C’était l’exigence d’Aqmi, al-Qaïda au Maghreb islamique, pour relâcher l’otage français Pierre Camatte. Et pour la presse malienne dans son ensemble, il est clair que le Mali a cédé aux demandes de la France.
Ainsi pour le journal Nouvelle Libération , cette « victoire du pot de fer sur le pot de terre était prévisible. (…) Il était quasiment impossible pour les autorités de notre pays, affirme le journal, de résister à la forte pression de la France, qui voulait voir son ressortissant libéré même au prix d’un pacte avec le diable. (…) Bien que la France sache que dans les normes internationales, il est interdit dans la lutte contre le terrorisme, de verser des rançons ou de céder aux chantages, déplore Nouvelle Libération, celle-ci a fait fi de ces dispositions en obligeant le Mali à franchir ce Rubicon. »

Les relations Bamako-Alger assombries

« Le président ATT a cédé sous la pression de Paris. Il s’attire les foudres d’Alger », titre L’Inter de Bamako qui précise que le président malien a libéré « les terroristes au bout d’un procès. Ainsi, il satisfait la France et le groupe terroriste et se trouve désormais dans la ligne de mire de l’Algérie qui souhaitait l’extradition de son ressortissant (…). Cette libération alourdit, estime L'Inter, le ciel déjà assombri par la non-implication de notre pays, aux yeux de l’Algérie, dans la lutte contre les terroristes qui ont élu domicile dans le nord du Mali. »
Le quotidien Le Pays  au Burkina s’interroge : « fallait-il continuer à garder les quatre islamistes d’Aqmi au risque de mettre en péril la vie de l’otage français Pierre Camatte aux mains des fous de Dieu ou fallait-il les libérer au risque de compromettre les relations avec la grande voisine du Nord, l’Algérie qui les réclamait à cor et à cri ? Dans un cas comme dans l’autre, le mal était infini et Bamako était entre le gros marteau de Paris et la rugueuse enclume d’Alger. »
En tout cas, relève Le Pays, « cette histoire, qui a donné de l’urticaire pendant des semaines aux autorités bamakoises, peut se répéter à tout moment. Petit pays au grand désert, le Mali a besoin d’un véritable coup de pouce de la sous-région mais aussi des Occidentaux, face aux agissements islamistes (…). Tant que la lutte contre le terrorisme dans la bande sahélo-sahélienne ne se fera pas de façon concertée et en lien avec les efforts internationaux en la matière, conclut le quotidien burkinabé, le Mali restera toujours le gros mouton du sacrifice aux mains des fous d’Allah. »

5 millions de dollars pour les Espagnols ?

Pour ce qui concerne les otages espagnols à présent, Le Républicain à Bamako reprend les dernières informations publiées dans la presse espagnole. Des informations comme quoi « Madrid aurait remis plus de cinq millions de dollars aux terroristes d’al-Qaïda au Maghreb islamique par le biais d’un chef Touareg. L’affaire aurait été conclue fin janvier entre l’Espagne donc et un groupe qui sert d’intermédiaire avec les autorités maliennes. Le quotidien El Mundo, précise Le Républicain, affirme que ce montant (de 5 millions de dollars) lui a été 'confirmé' par un membre du gouvernement. »

El Mundo qui a publié également une interview du président malien Amadou Toumani Touré, lequel se déclare « confiant pour les jours à venir concernant les six otages européens. »
Alors pour le quotidien malien, « contrairement à la Grande Bretagne, la France a cédé au chantage d’al-Qaïda pour sauver la vie de Pierre Camatte, et l’Espagne est dans la même logique. (…) Pour certains, relève Le Républicain, c’est une avancée inexorable vers la remise en cause de la lutte contre le terrorisme. »
Allusion directe à l’Algérie… Et la presse algérienne n’est pas tendre envers la France… La Tribune notamment dénonce « la pression exercée sur le Mali par Bernard Kouchner pour libérer les prisonniers –terroristes- en contrepartie d’un otage français. Cela va à l’encontre de la proposition de l’Algérie qui, par le biais de l’ONU, a fait passer une résolution criminalisant la rançon dans les opérations de libération d’otages. », s’exclame La Tribune.
Et puis pour Liberté, autre quotidien algérien, « les divergences de vues entre Alger et Paris sur beaucoup de dossiers de la région, notamment le Sahara occidental et le terrorisme dans la région du Sahel, ne font qu’accentuer la rancune accumulée. »

Publié dans Le Mali

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